« Goutte d'or » de Clément Cogitore, avec Karim Leklou, Jawad Outouia, Elyes Dkhissi et Ahmed Benaissa.
Metteur en scène d’opéra et cinéaste original de grand talent, Clément Cogitore, 39 ans, réussit l’exploit de réenchanter le territoire actuel la plus problématique de la capitale.
A savoir celui qui s’étend de Barbès-Rochechouart à la porte de la Chapelle, en passant par la Goutte d’Or.
Là, renouant avec la tradition du réalisme poétique né avant la Seconde Guerre mondiale avec René Clair et Jacques Prévert, Clément Cogitore filme avec maestria les chantiers, les souterrains, les terrains vagues, les habitations plus ou moins lépreuses ou encore les passerelles surplombant le boulevard périphérique.
Des décors naturels particulièrement sinistres où il situe les personnages de son histoire, y transposant ainsi une sorte de néo cour des miracles peuplée principalement de marabouts africains, de migrants, de consommateurs de cracks ou de bandes de jeunes mineurs maghrébins.
C’est au coeur de cette véritable zone de non droit, où les forces de police font de la figuration, que Ramsès (impressionnant Karim Leklou, qui s’impose de plus en plus comme un acteur incontournable du cinéma français), tient son cabinet de voyance.
Un truqueur aussi manipulateur et habile qu’un vulgaire joueur de bonneteaux, qui n’hésite pas à exploiter une clientèle crédule à la recherche de contacts avec leurs chers défunts ou de promesses d’un avenir meilleur.
Mais la mort d’un gamin d’une bande de jeunes voleurs originaires de Tanger, tué par ceux d’une bande rivale, va rompre le petit train-train de son florissant et sordide commerce de la consolation.
Ramsès va être entraîné bien malgré lui dans cette guerre des néo Apaches locaux et perdre peu à peu pied entre ses mises en scènes mensongères et ses véritables visions.
De plus en plus halluciné, il devra recourir aux conseils de son vieux père, adepte en sorcelleries en tout genre, superbement incarné par l'acteur algérien Ahmed Benaissa, qui est décédé à l’âge de 78 ans, le jour de la présentation du film à la Semaine de la Critique au festival de Cannes 2022 !
C’est dire que « Goutte d’or » est un film dérangeant et magique, qui bouscule allègrement les codes du politiquement correct en usage.
Outre les blacks et les arabes, ici, la principale receleuse des portables et autres objets de valeur des vols à l’arraché de nos délinquants mineurs (superbe bande de jeunes acteurs en herbes sauvages) est une matrone asiatique.
N’hésitez pas à découvrir l’univers singulier du film noir en forme de thriller politique de ce jeune réalisateur déjà expérimenté, alliant la virtuosité d’un Patrice Chereau à la spiritualité d’un Olivier Py !
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