L’activité cinématographique est si riche et si variée, tout spécialement à Paris, au point qu’il me reste encore à rendre compte de trois très bons films sortis la semaine passée, avant d’aborder les dernières nouveautés !
« Retour à Séoul » de Davy Chou, avec Park Ji-min (II), Oh Kwang-rok et Guka Han.
A l’occasion d’une escale involontaire à Séoul, Freddie, 25 ans, en partance pour le Japon, retourne pour la première fois en Corée du Sud, pays où elle est née et a été adoptée, bébé, par un couple français.
C’est alors qu’elle se retrouve totalement submergée par son passé et part à la recherche de ses parents biologiques.
Lors de ce premier séjour, elle rencontre son géniteur, remarié et père de deux jeunes filles, tandis que sa mère refuse de la voir.
Début d’une longue quête douloureuse et qui nécessitera plusieurs voyages, étalés sur sept années.
C’est cette quête d’identité, passablement violente, axée sur une héroïne impulsive et révoltée (remarquable interprétation de Park Ji-min, une artiste plasticienne dont c’est le premier rôle), que le cinéaste franco-cambodgien Davy Chou nous donne à suivre jusqu’à sa résolution.
Un film qui aborde avec virtuosité et sensibilité toute la complexité des problèmes liés à l’adoption internationale et à la confusion culturelle que cela engendre chez les adoptés…
https://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19599044&cfilm=279458.html
« Interdit aux chiens et aux Italiens » d’Alain Ughetto, avec les voix d’Ariane Ascaride et Alain Ughetto.
Un superbe film d’animation, où le réalisateur n’hésite pas à mettre la main à la pâte (à modeler) pour nous conter une émouvante histoire d’immigration.
Celle de Luigi Ughetto et de toute sa famille qui, pour échapper à la misère, durent quitter au début du XXe siècle leur village piémontais d’Ughettera, dans le nord de l’Italie.
Abandonnant le berceau natal, celle-ci s’enracinera définitivement dans un coin prospère de France.
C’est grâce aux souvenirs égrenés par sa grand-mère, Cesira (à laquelle Ariane Ascaride prête sa voix-off), et à ses réponses à ses questions, que ce dernier a pu visuellement et manuellement reconstituer toute la saga de ces « travailleurs nomades », ainsi qu’il définit lui-même ces migrants venus louer leurs forces manuelles hors de chez eux.
Ici, la misère, les drames personnels, les deuils, les échos de la grande histoire avec l’installation du fascisme en Italie rendant le retour improbable, où les manifestations de xénophobie rencontrées par les « ritals » dans l’hexagone sont rendus moins pénibles du fait de l’amour indéfectible unissant tous les membres du clan familial.
Un film tout en délicatesse et même en reconnaissance pour le pays d’accueil et d’adoption.
Ce qui change un peu des films actuels sur les thèmes sensibles de l’émigration en provenance des anciennes colonies.
Là, en effet, à la question du petit Alain Ughetto, né en France, qui lui demande de quel pays il est exactement, Cesira lui répond, tout simplement, que l’on n’est pas d’un pays mais de son enfance…
https://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19597737&cfilm=279640.html
« Ashkal, l'enquête de Tunis » de Youssef Chebbi, avec Fatma Oussaifi, Mohamed Houcine Grayaa et Rami Harrabi.
Un saisissant polar, aux relents politiques et paraboliques pour ce premier long-métrage du réalisateur tunisien Youssef Chebbi.
Ici, deux flics, Fatma et Batal, sont chargés d’enquêter sur l’étrange découverte de corps nus et calcinés retrouvés aux abords des « Jardins de Carthage », un important complexe immobilier créé à la périphérie de Tunis à l’époque de Ben Ali mais dont le chantier avait été interrompu au début de la révolution de jasmin.
Entre émancipation et implication avec le régime précédent, ces deux policiers de sexe et de génération différentes symbolisent, plus de 10 ans après l'immolation de Mohammed Bouazizi, qui avait mis le feu aux poudres, les conflits et les contradictions de la situation politique actuelle en Tunisie.
Une situation noire, très noire, ainsi qu’en témoigne ce thriller métaphysique et désenchanté, aux images glaçantes, quasi graphiques et à la musique atonale !
Entre la corruption ou l’immolation n’y aurait-il donc pas d’autres choix ?
Crime ou suicide, de quoi ces immolations qui se répandent comme une épidémie sont-elles le signe (traduction du mot Ashkal) ?
Un cinéaste talentueux et courageux à suivre…
https://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19599046&cfilm=303763.html
contact : jackybarozzi@aol.com