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Les Cafés de Paris,

XXe et début du XXIe siècles






   Après la Première Guerre mondiale, Montparnasse fut le point de ralliement de la bohème internationale, notamment des peintres : La Coupole, le Sélect, le Dôme, la Rotonde, la Closerie des Lilas… furent autant de centres où les artistes aimaient à se retrouver.

   Mais juste avant la Seconde Guerre mondiale, un mouvement migratoire vers Saint-Germain-des-Prés commença à s’esquisser. Dès l’hiver 1938-1939, parmi les fidèles du Flore et des Deux Magots n’appartenant « ni tout à fait à la bohème ni tout à fait à la bourgeoisie », on pouvait déjà apercevoir Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, alors tous deux en plein anonymat.

   Durant la guerre, notamment parce que les cafés étaient les seuls endroits convenablement chauffés, Sartre et Beauvoir y écriront leurs premières œuvres. Et c’est parmi cette jeunesse désoeuvrée, pour laquelle ils éprouvaient une « sympathie nuancée », que se recrutèrent, après la guerre, les

« existentialistes », dont Sartre, à son corps défendant (?), fut le principal maître à penser !






   Dans « La Force de l’âge » (Gallimard, 1960), Simone de Beauvoir se souvient : « Souvent Olga descendait de Montmartre à Saint-Germain-des-Prés. Ce fut elle, je crois, qui m’emmena pour la première fois au Café de Flore où je pris l’habitude, avec elle, avec Sartre, de passer mes soirées. L’endroit était devenu le rendez-vous des gens du cinéma : metteurs en scène, acteurs, script-girls, monteuses. On y coudoyait Jacques et Pierre Prévert, Grémillon, Aurenche, le scénariste Chavanne, les membres de l’ancien groupe « Octobre » : Sylvain Itkine, Roger Blin, Fabien Lorris, Bussières, Baquet, Yves Deniaud, Marcel Duhamel. On y voyait aussi de très jolies filles. La plus éclatante, c’était Sonia Mossé dont le visage et le corps superbe – bien qu’un peu plantureux pour ses vingt ans – avaient inspiré des sculpteurs et des peintres, entre autres Derain ; elle relevait sur sa nuque, en torsade savantes, d’admirables cheveux blonds ; la sobre originalité de ses bijoux, de ses toilettes me ravissait : j’admirai, entre autres, une robe de coupe stricte mais taillée dans un vieux et très précieux cachemire. Elle était en général accompagnée d’une plaisante brune, aux cheveux coupés court, et d’allure garçonnière. Parfois Jacqueline Breton faisait une apparition, des coquillages aux oreilles, les yeux hérissés de piquants, agitant, dans un cliquetis de bracelets, des mains aux ongles provocants. Mais le type féminin le plus répandu, c’était ce que nous appelions « les bouleversantes » : des créatures aux cheveux pâles, plus ou moins rongées par les drogues, ou par l’alcool, ou par la vie, avec des bouches tristes et des yeux qui n’en finissaient pas.

Le Flore avait ses mœurs, son idéologie ; la petite bande de fidèles qui s’y rencontraient quotidiennement n’appartenaient ni tout à fait à la bohème ni tout à fait à la bourgeoisie ; la plupart se rattachaient, de manière incertaine, au monde du cinéma et du théâtre ; ils vivaient de vagues revenus, d’expédients ou d’espoirs. Leur dieu, leur oracle, leur maître à penser, c’était Jacques Prévert dont ils vénéraient les films et les poèmes, dont ils essayaient de copier le langage et le tour d’esprit. Nous aussi, nous goûtions les poèmes et les chansons de Prévert : son anarchisme rêveur et un peu biscornu nous convenait tout à fait. Autrefois L’Affaire est dans le sac, plus récemment Drôle de drame, mis en scène par Carné, avec Barrault, Jouvet, Françoise Rosay, nous avaient charmés. Surtout nous avions aimé Quai des brumes, admirablement joué par Gabin, Brasseur, Michel Simon et par la merveilleuse inconnue qui s’appelait Michèle Morgan ; le dialogue de Prévert, les images de Carné, le brumeux désespoir qui enveloppait le film nous avaient émus : là aussi, nous étions d’accord avec notre époque qui vit en Quai des brumes le chef-d’œuvre du cinéma français. Cependant, les jeunes oisifs du Flore nous inspiraient une sympathie nuancée d’impatience ; leur anticonformisme leur servait surtout à justifier leur inertie ; ils s’ennuyaient beaucoup. Leur principale distraction, c’était « les bouleversantes » : chacun avait, avec chacune, successivement, une liaison de durée variable, mais en général brève ; le circuit bouclé, on recommençait, ce qui n’allait pas sans monotonie. Ils passaient leur journée à exhaler leur dégoût en petites phrases blasées entrecoupées de bâillements. Ils n’en avaient jamais fini de déplorer la connerie humaine. »




Simone de Beauvoir. Café de Flore, Paris, 1944. Photo : Gilbert Brassaï. 




Devanture du café Charbon (11e arr.).



   A la fin du millénaire, environ un siècle après avoir occupé les cafés de la rive gauche, la jeunesse branchée, a retraversé la Seine, pour envahir cette fois-ci l’est de la capitale. Aujourd’hui, les « bobos », qui se recrutent principalement dans les métiers de la communication, se concentrent du côté de la Bastille et des rues de la Roquette, de Charonne, Saint-Maur ou d’Oberkampf, dans le XIe arrondissement.








   Leurs points de rencontre : le café Charbon, Chez Justine, la Mercerie, le Barracao, l’Estaminet, le Cithéa, le Public, le Styx ou encore le Zabar café (liste non exhaustive et en constante évolution)…

   Pour la plupart, d’anciens bistros de quartier, où l’on peut boire et manger désormais dans une ambiance métissée, noyée de sons arabo-africains ou latino-américains.




Jacques Barozzi, août 2023.




par Jacky Barozzi 19 février 2025
Anacreon de Jean-Baptiste Claude Eugène Guillaume (1822 - 1905), marbre réalisé en 1849-1851. Au musée de l’homme nu Installé dans l'ancienne gare d'Orsay, le musée éponyme a été inauguré en 1986. Dit aussi musée du XIXe siècle, ses collections de peinture, sculpture, arts décoratifs, art graphique, photographie, architecture… en font l’un des plus grands musées d'Europe pour cette période. Outre la richesse des tableaux impressionnistes qui y sont exposés, on y trouve aussi quelques unes des plus belles sculptures de la seconde moitié du XIXe et du début du XXe siècle, époque flamboyante de la sculpture parisienne. Aux oeuvres de Rodin ou Bourdelle, déjà évoquées précédemment, mentionnons la puissance et la grâce des principaux nus masculins conservés à Orsay.
par Jacky Barozzi 17 février 2025
Le Génie de la Liberté , bronze de 1885, musée du Louvre. Splendeur et humilité de l’homme nu 4e, 11e et 12e arrondissements Place de la Bastille  Le Génie de la Liberté , dit aussi Le Génie de la Bastille , statue en bronze doré réalisée par Auguste Dumont (1801-1884). Elle surmonte depuis 1836 la colonne de Juillet. D'une hauteur de 4 mètres, elle figure la liberté sous des traits masculins et représente un génie ailé qui brandit, dans la main droite un flambeau et la gauche les chaînes brisées du despotisme, tout en s'élançant dans les airs depuis son pied gauche.
par Jacky Barozzi 16 février 2025
Hydrorrhage du sculpteur Jean-Robert Ipoustéguy. Un nu classé X 5e arrondissement Jardin Tino-Rossi, quai Saint-Bernard Aménagé en jardin entre 1975 et 1980, le quai Saint-Bernard est constitué d'une suite de promenades, entre les ponts d’Austerlitz et de Sully. C’est là qu’a été installé le musée de Sculptures en plein air de la Ville de Paris, consacré essentiellement aux œuvres de la seconde moitié du XXe siècle. Au centre, un rond-point constitué d’une succession de bassins semi-circulaires, abrite une bien singulière fontaine. Baptisée Hydrorrhage , celle-ci a été réalisée en 1975-1977 par l’architecte Daniel Badani et le sculpteur Jean-Robert Ipoustéguy. Derrière une imposante armure en forme de bouclier, on découvre un homme nu, harnaché d’un attirail relevant proprement de l’iconographie sado-masochiste, et suçotant une sorte de gland tout en se livrant à la masturbation ! Cette audacieuse œuvre, contemporaine de l’époque de la libération sexuelle, semble avoir dépassée les souhaits de son commanditaire. La municipalité a en effet récemment entouré d’un grillage et d’une haie d’arbustes l’ensemble des bassins, empêchant le visiteur de se rapprocher de cette fontaine, autrefois de plain-pied, et en a pudiquement détourné la gerbe principale, qui jaillissait du sexe du personnage et retombait dans le premier bassin depuis le gros tuyau recourbé au centre du bouclier, pour le remplacer dans un premier temps par les deux inoffensifs jets d’eau du bassin, situés de part et d’autre du groupe en bronze. Désormais, la fontaine est à sec et les bassins ont été transformés en pots de fleurs ! 
par Jacky Barozzi 14 février 2025
Le Triomphe de la République (détail), par Jules Dalou, 1899. Les nus triomphaux de Dalou Engagé dans les combats de la Commune, le sculpteur Parisien, Aimé Jules Dalou (1838-1902), ami d’Auguste Rodin, très en vogue dans le dernier quart du 19e siècle, nous a légué une multitude d’oeuvres monumentales ornant les façades, places, jardins, rues ou cimetières de la capitale. Des figures républicaines de style réaliste ou évoquant des scènes mythologiques, empreintes d’une sensualité affirmée, en marbre et en bronze.
par Jacky Barozzi 10 février 2025
Le dernier Calvaire de Paris (18e arr.) Christ et Atalantes Une multitude de Christ de douleur et d'Atlantes en sueur ornent les rues, les églises, les façades ou les cimetières de la capitale, parmi lesquels nous retiendrons ceux-ci. 18e arrondissement Quartier : La Chapelle La Croix de l'Évangile Cette croix de chemin ou calvaire, est la dernière visible à Paris. Elle est située à la jonction de deux chemins devenus, l'un la rue de l'Évangile, l'autre la rue d'Aubervilliers. Son histoire remonte au XVIe siècle, en 1540, à l’époque où une grande plaine s’étendait entre les villages de Saint-Denis, La Chapelle et La Villette, qui étaient alors à l’extérieur des remparts de la ville de Paris. C’était à l’époque, un lieu de vénération important. Chaque année, une grande procession effectuait un trajet triangulaire entre Saint-Denis, la croix de l’Évangile et La Villette. De la totalité des croix parisiennes détruites à la Révolution, seule celle de l’Évangile fut reconstruite en 1860 à son emplacement originel, au bout de la rue de l'Évangile, où les gazomètres de l’époque ont laissé la place à la zone d'activités Cap 18, qui est aujourd'hui la dernière zone Industrielle située dans Paris intra-muros.
par Jacky Barozzi 3 février 2025
Le Génie du sommeil éternel d'Horace Daillion au rond-point central du cimetière du Montparnasse (14e arr.). Éros necropolotain De nombreuses figures d’hommes nus, plein de vie ou de douleur, hantent les cimetières parisiens. Là, Éros n'est-il pas au plus près de Thanatos ?
par Jacky Barozzi 1 février 2025
Les Naufragés par Antoine Etex, 1859. Dangereuses chutes de reins au parc Montsouris 14e arrondissement Parc Montsouris  Conformément à la volonté de Napoléon III, la décision d’aménager cette grande promenade de 16 hectares sur le site de Montsouris fut prise en 1865. Les travaux commencèrent en 1867 sous la direction de l’ingénieur Jean-Charles Adolphe Alphand mais la guerre de 1870 les interrompit et le parc ne fut vraiment achevé qu’en 1878. De singulières sculptures d'hommes nus érotisent cette superbe promenade au sud de Paris.
par Jacky Barozzi 31 janvier 2025
Palais Bourbon (7e arr.), Prométhée animant les Arts , détail de la façade de la cour du pont (1837). Les hommes nus de Rude entre profane et sacré D’inspiration païenne, chrétienne ou républicaine de nombreuses figures d’hommes nus de François Rude (1784-1855), l’un des maîtres de la sculpture française du XIXe siècle, représentatif de la transition entre le néoclassicisme et le romantisme, sont visibles à Paris. Visite guidée en image ! 1er arrondissement Musée du Louvre
par Jacky Barozzi 24 janvier 2025
Le musée Rodin, vu du grand bassin au fond de la perspective ouverte depuis la façade principale. En son centre, on peut découvrir le groupe Ugolin et ses enfants , montrant ceux-ci mourant de faim et suppliant leur père de les dévorer, selon les célèbres vers de l’Enfer de Dante : « Le tourment, père, si tu nous manges, serait moindre pour nous ; c'est toi qui revêtis nos pauvres corps de chair, tu peux les dépouiller ».
par Jacky Barozzi 20 janvier 2025
L'histoire véritable d'un célèbre homme nu de Paris
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