« Everybody Loves Touda » de Nabil Ayouch, avec Nisrin Erradi, Joud Chamihy et Jalila Tlemsi.
Le cinéaste marocain Nabil Ayouch, dont les précédents longs métrages abordaient déjà, sans tabous ni interdits, les sujets les plus sensibles et les plus délicats de la société patriarcale marocaine, tels la sexualité, la condition des femmes ou la prostitution, nous offre avec « Everybody loves Touda » un film plus poétique que politique, mais néanmoins tout aussi engagé.
A la splendeur des paysages marocains, filmés sur plusieurs saisons, Nabil Ayouch adjoint ici la force et la beauté d’une forme de la musique traditionnelle nationale.
Son héroïne, Touda, rêve de devenir une Cheikha, chanteuse d’aïta, un art poétique et musical marocain ancestral.
Se produisant tous les soirs dans les bars de son bled et à l’occasion de fêtes locales, elle songe cependant à un avenir meilleur pour elle et son fils, sourd et muet.
C’est ainsi qu’elle décide de tout quitter pour les lumières de Casablanca...
« Everybody Loves Touda », qui commence par une scène de viol insupportable et s’achève par un magistral plan-séquence de 8 minutes au sommet d’un palace de Casablanca, est avant tout un film musical, comme le revendique le réalisateur : "La musique y prend une place importante au point de devenir narrative, que ce soit l’Aïta ou la musique populaire que Touda chante dans les cabarets, car les paroles ont un sens. »
Et quel sens !
Le film est porté par l’exceptionnelle comédienne Nisrin Erradi, qui s’est formée pendant un an et demi avec des Cheikhates professionnelles, pour apprendre à chanter, à danser, à jouer de la percussion et même à parler comme elles.
Imaginez une chanteuse de fado dansant le flamenco, mais le tout à la mode orientale, sous le regard concupiscent des hommes !
Vous aurez ainsi une petite idée du personnage incandescent incarné par Nisrin Erradi (un mixte d’Anna Magnani et de Maria Schneider), celui d’une femme forte, sensuelle, chantant l’amour et la liberté.
Difficilement tolérable dans une société archaïque et religieuse où une telle femme, qui ne demande pourtant qu’à être reconnue comme une artiste au service de la pureté de son art, est essentiellement considérée comme une putain.
Vous aussi vous aimerez Touda, le personnage et le film !
https://www.youtube.com/watch?v=ykcMJZM-xnQ
contact : jackybarozzi@aol.com