Sept films, entièrement rénovés, de François Truffaut (1932-1984) sont projetés cet été au Reflet Médicis, l’occasion pour moi d’aller voir l’une des rares oeuvres de sa filmographie jamais visionnée jusqu’alors : « L’Argent de poche » (1976).
Un film nostalgique et plein de charme, prétexte pour le cinéaste de s’attacher à la vie quotidienne des gamins de la classe de Mlle Petit (Chantal Mercier) et M. Richet (Jean-François Stevenin), instituteurs à Thiers (Puy-de-Dôme), l’année qui précède l’instauration des classes mixtes.
Autre temps, autres moeurs !
Dans ce film, on retrouve toute la tendresse de Truffaut pour l’enfance maltraitée, l’un de ses grands thèmes favoris, avec l’amour de la femme ( et non des femmes, nuance, dixit Charles Denner dans « L’Homme qui aimait les femmes »).
Des trois mousquetaires de la Nouvelle Vague, passés très vite de la théorie, à la fin des années 1950 dans les « Cahiers du cinéma », à la pratique, Truffaut, est sans conteste le moins cérébral et le plus sentimental d’entre eux.
Là où Jean-Luc Godard s’est affirmé comme le chantre d’une morale esthétique cinématographique et Claude Chabrol, dénonçant les travers de sa bourgeoisie d’origine, celui d’un cinéma à caractère nettement plus politique, le cinéma de Truffaut s’intéresse exclusivement, à quelques exceptions prés, au sentiment amoureux, depuis l’éveil à la sexualité jusqu’aux désordres ravageurs de la passion (« L’Histoire d'Adèle H. » (1975),
« La Femme d'à côté » (1981).)
De ces trois amoureux de la littérature et du cinéma, Truffaut est aussi le plus intimiste, puisant directement son imaginaire dans ses souvenirs personnels.
Cela, dès son premier coup d’éclat, avec « Les Quatre cents coups » (1959), où il s’est inspiré de sa propre enfance, avec une mère qu’il adorait mais qui, elle, ne répondait pas à la soif d’amour de son fils.
De telle sorte que la totalité de la filmographie de François Truffaut peut se lire comme les oeuvres complètes du roman de sa vie.
Un cinéaste auto fictif, à l’occasion acteur (« La Chambre verte »), mais le plus souvent représenté par son double : Jean-Pierre Léaud dans les « Quatre Cents Coups », « Antoine et Colette », « Baisers volés » ou « Domicile conjugal » et « L’Amour en fuite » ; Charles Denner dans « L’Homme qui aimait les femmes » ou encore Jean-Louis Trintignant dans « Vivement dimanche ! »
Une filmographie, non exempt de violence, mais qui se caractérise toujours par la douceur du regard porté par le cinéaste, sur l’enfance tout autant que sur les femmes : nul donjuanisme ni machisme chez les personnages masculins de François Truffaut.
contact : jackybarozzi@aol.com