« Au coeur du bois », film documentaire de Claus Drexel.
Passionné du cinéma de Werner Herzog dont le travail se situe toujours aux confins de la réalité et de l’imaginaire, le cinéaste Claus Drexel, bavarois d’origine, installé à Paris, aime à enchaîner les documentaires et les films de fiction.
C’est ainsi qu’après Au bord du monde (2014), un superbe documentaire sur les SDF parisiens, nous avons pu voir, entre deux confinements et fermetures de salles, Sous les étoiles de Paris (2021), une comédie dramatique sur le même thème, avec Catherine Frot en clocharde revêche et généreuse.
Aujourd’hui sort sur nos écrans un nouveau documentaire, consacré essentiellement aux travelos du bois de Boulogne auxquels, comme à son habitude, le cinéaste, loin de tous misérabilisme et dans une forme esthétiquement soignée, leur donne librement la parole, sans jamais les soumettre à la question.
Samantha, Isidro, Geneviève et les autres travailleuses trans du sexe témoignent pour nous, au tarif d’une passe, de leur singulière condition de prostituées.
Encore jeunes ou passablement défraîchies, françaises, brésiliennes ou portugaises d’origine, elles sont délicatement mises en scène sur leur lieu de travail, dans leur propres habits de cérémonie, au coeur du bois, resplendissant de ses plus belles couleurs saisonnières, de jour comme de nuit.
Telles de joyeux ludions tout droit échappés d’un conte de fée, celles-ci, à travers leurs prises de paroles, nous font toucher du doigt une certaine réalité.
Une vérité à dimension sociologique, tout d’abord, sur elles mais aussi sur leur clientèle, diverse et variée, et les pratiques en usage.
Un véritable cours d’éducation sexuelle appliquée, sans détour et avec les mots directs et les mieux appropriés !
Nous avons même droit, grâce à l’une des plus anciennes d’entre elles, à un rappel historique sur le droit pénal en usage, qu’elles ont eu à subir sous les divers gouvernements qui se sont succédés.
Selon elle, le regroupement familial prôné par Giscard fut économiquement catastrophique. Les années fastueuses vinrent ensuite, durant la cohabitation, avec Pasqua à l’Intérieur ! Avec Sarkozy elles redevinrent hors la loi. Mais le pire était encore à venir, avec les socialistes et les féministes, et la pénalisation du client.
Depuis, le métier ne serait plus ce qu’il était.
Il est question aussi des problèmes sanitaires et d’hygiène, des craintes et difficultés d’être sans papiers, de ne bénéficier d’aucune sécurité sociale ni d’avoir droit à la moindre retraite, malgré les amendes régulièrement alignées et acquitées et les brimades subies.
Sans parler de la peur de se faire attaquer, dépouiller, voire même assassiner…
Et malgré tout cela, la plupart de ces femmes hormonées et toujours membrées affichent un bel enthousiasme face à la vie ; tout en acceptant le prix à payer, elles disent leur amour du bois de Boulogne, de leur relative liberté et parlent même, pour certaines, de l’amour de leur métier, de son utilité.
Respect !
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