« Les Fantômes » de Jonathan Millet, avec Adam Bessa, Tawfeek Barhom et Julia Franz Richter.
Avec son premier film de fiction, présenté en ouverture de la Semaine de la critique au dernier festival de Cannes, Jonathan Millet a frappé fort.
A l'origine, ce capteur d’images, qui a longtemps parcouru le monde pour y filmer des paysages et des visages, pour des banques de données d’images, voulait faire un documentaire centré sur un centre de soin pour victimes de guerre.
Jusqu’à sa rencontre, en France et en Allemagne, de nombreux réfugiés Syriens dont il recueillit les récits, de guerre, d’emprisonnement et de torture et entendit parler de réseaux secrets traquant en Europe les criminels de guerre.
Ainsi est née l’idée de son film, axé autour de la figure d’Hamid et de sa traque à Strasbourg de son ancien bourreau.
Un film pour lequel Jonathan Millet a pris tout son temps : bien documenté, intelligemment écrit et pour lequel il s’est livré a un casting long et soigné.
Ce qui lui a permis de trouver les bons interprètes dont l’étonnant Adam Bessa, sur les épaules duquel repose toute l’histoire.
Un film d'espionnage sous forme de thriller géopolitique, particulièrement haletant et subtil, qui nous tient en haleine de bout en bout.
Un autre cas de basculement entre vengeance et justice, qui va bien au-delà du pur divertissement du film de genre.
Ici, Edmond Dantès n’est plus un personnage historique de cape et d’épée mais est bien ancré dans la réalité contemporaine.
Hamid, ancien professeur de littérature, qui a perdu sa femme et sa fille, victime d’un tortionnaire impitoyable, et dont le seul lien qui le rattache à son pays d’origine, devenu la chasse gardée de Bachar el-Assad et de son allié Poutine, est sa vieille mère, survivant dignement dans un camp de réfugiés au Liban.
Fantôme parmi les fantômes, comment peut-il se reconstruire ?
A la question pourquoi ces « fantômes » ? » Jonathan Millet répond : « Mon projet était de réaliser un film sur l’invisible, à commencer par l’intériorité d’Hamid, ses traumas, son corps en mouvement… L’invisible représente aussi ces groupes secrets dont personne n’a jamais entendu parler ainsi que ces criminels de guerre pourchassés qui n’ont pas de visage. Le pluriel me permet aussi d’inclure tous les exilés de manière générale, ceux que l’on croise sans les voir. ».
Un film ambitieux pour un pari tenu.
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