« The Wastetown » de Ahmad Bahrami, avec Baran Kosari et Ali Bagheri.
Après tant d’autres, tel le récent « Les Ombres persanes » de Mani Haghighi, voilà encore un film des plus singuliers en provenance d’Iran.
A croire que les régimes totalitaires, où il faut sans cesse ruser avec la censure, soient particulièrement propices à la création, et qu’un nouveau cinéma iranien ne cesse d’éclore, lentement mais surement, sur nos écrans !
« The Wastetown » (La citée désolée) est le second long métrage de Ahmad Bahrami.
Le premier, « Panah » (2017), n’est jamais sorti en France et probablement à l’étranger.
Ici, le cinéaste iranien s’attache au pas d’une véritable héroïne de tragédie, Bermani, une jeune femme emprisonnée durant 10 ans pour avoir tué son mari alors qu’il la battait à mort.
Ayant accouché d’un garçon au début de son incarcération, elle en fut séparée deux ans plus tard.
Le film commence au moment de sa libération conditionnelle, par un long plan en noir et blanc.
On la voit cheminer à travers un paysage de désolation, en périphérie urbaine, vers la casse automobile où travaille son beau-frère, le seul qui puisse lui dire ce qu'est devenu son enfant.
Dès lors, le ton du film est donné, dans toute son austérité et sa beauté.
Nous pénétrons ainsi avec elle dans ce site dantesque, l’un des derniers cercles de l’enfer, d’où nous ne ressortirons plus.
Telle la Callas dans Médée, mais au mythe inversé, Bermanie (incarnée par la superbe actrice Baran Kosari), malgré toute la force de sa détermination pour se débarrasser des hommes afin de sauver son enfant, va se prendre irrémédiablement dans les fils de la toile d’araignée d’une société solidement tissée à leur seul profit.
Un étonnant conte persan, qui nous transpose dans un univers contemporain incarné par un cimetière d’automobiles.
Là, avec peu d’effets de caméra et une économie de dialogues, le film de Ahmad Bahrami, illustrant une histoire de féminisme sans retour, est souligné uniquement par les sons récurrents d’une musique concrète, tel celui de l’impressionnant compresseur transformant les humains en autant d’artistiques sculptures de César !
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